29e Festival international du film d’histoire
Palmarès 2018
Le festival international du film d’histoire de Pessac vient de décerner ses récompenses aux meilleurs films sélectionnés cette année.
Dans la catégorie Fiction, le prix du jury professionnel revient aux Témoins de Lendsdorf d’Amichai Greenberg (Israël-Autriche, 2017), tandis que le jury étudiant a donné sa préférence à Leto de Kirill Serebrennikov (Russie-France, 2018) auquel ce blog a déjà consacré un article enthousiaste.
Dans la catégorie Documentaires Inédits, c’est L’Homme que nous aimions le plus de Danielle Jaeggi qui est récompensée par le jury professionnel. Pour plus de détails sur ce palmarès, vous pouvez dès à présent consulter le site du Festival.
La mémoire et l’oubli
Concernant ces trois films lauréats, on notera que chacun d’eux se penche à sa façon sur le rapport noué entre la mémoire et l’oubli. Si Leto fait revivre, non sans humour, la scène rock soviétique des années 1980 et de la décennie précédant la chute du Mur, le film rend hommage à deux figures tôt disparues : celles de Viktor Tsoï et Mike Naumenko dont le premier, quasiment inconnu en Occident, fut une idole dans son pays et participa à sa manière aux bouleversements de l’histoire. Le jury étudiant a aimé ce film « qui aime tous ses personnages, et qui porte dans ses tripes l’idée qu’on se libère de l’oppression par la création acharnée».
Notre relation intime à l’Histoire
Les Témoins de Lendsdorf d’Amichai Greenberg retrace l’enquête d’un historien juif orthodoxe obsédé, envers et contre tous, par un massacre perpétré en Autriche à la fin de la Seconde Guerre mondiale. « C’est un film qui hante et interroge », précise le jury professionnel qui l’a choisi. Un film « qui parle de notre relation intime à l’histoire ».
L’Homme que nous aimions le plus, le film de Danielle Jaeggi, interroge également l’histoire au regard de l’intime. Pour la réalisatrice, il s’agit d’explorer ses souvenirs d’enfance, ceux d’une petite fille suisse élevée dans les années 1950-60 par des parents communistes entraînés dans les pièges troubles de la Guerre froide.
La peur de trahir un secret
Ce très beau documentaire vaut tout particulièrement par sa charge émotionnelle. Danielle Jaeggi rencontrée cette semaine à Pessac raconte comment, à soixante-huit ans passés et beaucoup d’autres documentaires à son actif, elle ressentit le besoin d’aller explorer les archives et interroger les amis de ses parents pour comprendre enfin ce qu’on lui a si longtemps caché :
« Aujourd’hui encore, il me reste de cette enfance silencieuse la peur de dire quelque chose de dangereux, la peur de trahir un secret. Il fallait être fort, ne jamais douter. Et savoir être seule.»
Grâce à Danielle Jaeggi, on a rarement aussi bien compris comment et pourquoi ceux qui s’engagèrent pour le meilleur et pour le pire restèrent fidèles jusqu’au bout, même quand il fallut payer le prix de cette fidélité par la trahison des idéaux qui en avaient été le moteur.